Le feu rouge
Un jour, mon frère m’a
dit : « au feu rouge, on obéit à une ampoule ».
Aussi
absurde que cela puisse paraître, il avait raison. On pourra dire que si
l’ampoule s’allume, c’est parce qu’elle a été programmée pour ça, que derrière
le fonctionnement du feu se cache un ordinateur ou à tout le moins un programmateur,
qui ne fait, finalement, que refléter une volonté humaine. Plus prosaïquement,
on pourra dire que le maire de la ville a fait installer ce feu pour réguler la
circulation, et que ce maire a été élu. Que c’est donc la volonté des habitants
et non celle d’un seul homme, que de voir ce feu planté là.
Chacun,
faisant preuve de bon sens, conviendra que ce feu est bien utile pour éviter
des accidents lorsqu’il y a beaucoup de circulation.
Ainsi,
l’être humain s’auto-régule de manière collective en abandonnant volontairement
une part de son pouvoir de décision à la collectivité. C’est donc finalement la
collectivité qui contrôle l’individu. C’est exactement ce qui se passe lors des
élections : on délègue un part de notre souveraineté individuelle vers une
autorité (le maire, le parlement, le président de la République, ou tout
simplement le bureau d’une association).
Mais les masses ont tort et les individus ont
raison.
En effet, quid du libre arbitre s’il n’y a
personne ? Si aucune voiture ne se présente alors que le feu piéton est
rouge ? Que se passe-t-il ? Deux solutions sont observées : soit
la personne est, pour ainsi dire « obéissante », disons civilisée, ou
respectueuse du droit, et ne traverse pas. Soit la personne n’est rien de tout
cela et traverse malgré l’interdiction.
Pourtant, cette réflexion est trop simple. On
peut très bien être civilisé, connaître les règles et les respecter la plupart
du temps, et décider tout-à-coup de ne plus les respecter pour une bonne
raison. Plus exactement, une raison que l’individu va juger bonne.
Pourquoi ? Dans notre exemple, la raison est simple : pas de voitures
à l’horizon, donc, pas de danger. En conséquence on peut traverser sans risque,
puisque le feu n’a plus sa raison d’être. Ainsi dans certaines circonstances,
notre libre arbitre peut nous pousser à déroger (ce qui est différent de
désobéir) à la règle communément admise.
Ceci est à mes yeux très important car cela
justifie énormément d’actes : on n’a pas le droit de tirer sur quelqu’un
mais si on est en danger on le peut (principe de la légitime défense). On ne
peut pas se baigner dans tel lac ou rivière, mais si quelqu’un se noie, on se
doit d’aller le sauver. Etc. Les exemples seraient nombreux ! En poussant
le raisonnement, on atteint les notions de justice privée et de justice
publique, de libre arbitre, d’exception à la loi etc.
Ceci pose finalement la question de savoir dans
quelle mesure on a le droit de déroger aux règles établies.
Aussi je pose la question : on traverse ou
pas ?